Femmes enceintes migrantes et accès aux soins : une iniquité dont nous payons tous le prix.

Mis à jour le: No revision

Tous les parents veulent le mieux pour leur enfant. Les parents réfugiés ou migrants, qui ont fait le deuil de leur pays d’origine pour offrir un avenir meilleur à leur enfant, n’en font pas exception.  Ils évoquent souvent leur détermination à contribuer à la postérité de leur pays d’adoption, leur souhait que leurs enfants y réussissent et contribuent à leur tour à bâtir ce pays. Or, pour de nombreuses femmes enceintes, un statut migratoire précaire réduit leur accès à un suivi et à des soins périnataux adéquats et augmente le risque que leur nouveau-né vienne au monde avec un faible poids (moins de 2 500 g) et paie le prix toute leur vie : risque plus élevé de maladies respiratoires, de retard de croissance et de développement lors de l’enfance, ainsi que des difficultés du développement cognitif et du langage.

La situation des femmes enceintes et des nouveau-nés à statut migratoire précaire fait partie du quotidien et des préoccupations des intervenantes du Dispensaire diététique de Montréal depuis longtemps.  D’abord, les intervenantes constatent les immenses besoins de ces femmes vivant souvent avec des revenus extrêmement limités et des inquiétudes quant à leur avenir incertain, en plus de vivre tous les questionnements et bouleversements associés à la grossesse et la venue d’un bébé des futurs parents, sans le soutien social et face à beaucoup d’inconnu.  Aussi, elles observent que ces femmes enceintes ont des difficultés d’accès aux ressources de prévention et de soins ainsi qu’aux services de soutien psychosocial qui pourraient faire une énorme différence dans leur expérience, dans leur santé et dans leur intégration. Cela fait en sorte que de nombreuses familles attendent que la situation devienne vraiment critique avant de finalement se présenter à l’hôpital et d’assumer la facture qui en résultera.

Bien souvent, si la femme enceinte avait pu consulter plus tôt, le problème se serait réglé plus rapidement, aurait entraîné moins de douleur, moins de complications et une facture moins élevée pour elle, mais aussi pour le système. Le système de santé peut déjà être difficile d’accès pour toutes et tous : les bulletins de nouvelles nous le rappellent régulièrement.   Il l’est encore plus pour les femmes enceintes à statut précaire.

À notre avis, une partie de la solution se trouve donc dans une précision et une évolution du cadre juridique, mais aussi dans une meilleure communication et coordination des divers acteurs, car bien que ce cadre juridique ne relève pas de notre organisation, nos intervenantes le constatent chaque jour : il faut beaucoup d’efforts pour assurer l’accès à un minimum décent de services auprès de ces femmes enceintes, pour les informer de leurs droits, pour que des professionnels puissent offrir leur service à ces clientèles sans risque ou représailles.

Les ressources de la communauté viennent partiellement répondre à certains besoins des familles que l’on pense aux ressources en aide matérielle et alimentaire, aux soins médicaux d’appoint, aux haltes-garderies et autres services de soutien aux femmes enceintes et aux tout-petits. On sait aussi qu’en prénatal, des femmes hésitent à cogner aux portes des institutions de santé du réseau public québécois par crainte que de dévoiler leur statut pourrait leur nuire plus tard. On sait également qu’il existe une réelle incompréhension des lois qui permettent l’accès aux soins. La complexité des questions entourant l’immigration et l’accès aux soins de santé commande donc une réponse collective. Nommer ces enjeux, démystifier cette réalité est déjà un pas important, et en ce sens nous saluons le travail de l’Observatoire des tout-petits.

Nous savons toutefois qu’intervenir au bon moment évitera des complications futures et aura un impact significatif sur le développement de l’enfant, puisque la grossesse et les premières années constituent la période cruciale pour lui offrir des chances égales de réussir.  Des études menées au Québec et aux États-Unis démontrent qu’un accompagnement nutritionnel durant la grossesse, accompagné de remise d’aliments, permet des économies importantes en frais de soins de santé chez le nourrisson.

Si on réfléchit à long terme, si on considère l’investissement et les bénéfices d’agir dès la grossesse, si on se rappelle qu’accompagner et agir tôt est à notre portée et génère des impacts importants en étant rentable, est-ce que, comme société, on a encore un argument pour ne pas offrir une chance égale à tous les tout-petits du Québec?

Photo : Nathalie Choquette  

 

 

 

 

Previous articleComment traiter le muguet ?
Next articleMars 2019

En collaboration avec les intervenantes du Dispensaire

Contenu qui pourrait vous interesser

Commentaires

Suivez-nous

1,910FansLike
65FollowersFollow
216SubscribersSubscribe

DERNIERS AJOUTS

PRINCIPAUX PARTENAIRES
PARTENAIRES

Slide Slide Slide Slide Slide